Conseil d'État, , 09/06/2020, 440783, Inédit au recueil Lebon

Date09 juin 2020
Record NumberCETATEXT000042065831
Judgement Number440783
CourtCouncil of State (France)


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 22 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société JMPL demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution des articles 2, 3, 7, 10 et 27 du décret n° 2020-548 du 11 mai 2020 ;

2°) d'enjoindre à l'Etat, sans délai et sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'ordonnance à intervenir, de prendre les mesures suivantes :
- autoriser la réouverture administrative de son établissement ;
- si la réouverture n'est pas possible, couvrir la marge bénéficiaire réalisée par l'établissement à la même époque les années précédentes ;
- si la réouverture est possible mais insuffisamment rentable, couvrir la marge bénéficiaire manquante due aux conditions restrictives imposées par la pandémie et prendre en charge les frais exposés en vue d'instaurer les mesures barrières ;
- si le restaurant souhaite diversifier son offre en se lançant dans la restauration à emporter en période de crise, prendre en charge les frais engendrés par le développement de cette activité ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




Elle soutient que :
- elle justifie d'un intérêt à agir dès lors qu'il lui est interdit d'exercer son activité depuis le 14 mars 2020 et que cette interdiction est maintenue depuis le 11 mai 2020 sans qu'aucune date de réouverture ne soit juridiquement prévue ;
- la condition d'urgence est satisfaite eu égard, en premier lieu, à l'existence avérée de la pandémie, en deuxième lieu, aux conséquences économiques et patrimoniales de la fermeture de l'établissement et de l'absence de date de réouverture, en troisième lieu, à la nécessité de préserver la vie des entreprises afin qu'elles contribuent au financement du système de santé et, en dernier lieu, à l'absence de motifs de nature à justifier le maintien de la fermeture de son établissement alors que le risque pandémique n'est pas le même pour l'ensemble des personnes infectées ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale au principe de sécurité juridique, au principe d'égalité devant la loi, au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre, au principe de non-discrimination, au droit à la vie et à la liberté d'aller et venir ;
- le décret attaqué méconnaît l'objectif de valeur constitutionnelle de prévisibilité et de sécurité juridique en ce qu'il instaure des dispositions imprécises, confuses, évolutives et susceptibles de conduire à une méconnaissance du principe d'égalité devant la loi ;
- il porte une atteinte disproportionnée à deux des composantes du droit de propriété dès lors qu'il rend la valeur patrimoniale de son établissement incertaine et la prive de l'usage de cet établissement, et ce bien au-delà de la période de confinement ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il ne permet pas de préserver la vie biologique et la vie économique de son établissement et de sa clientèle ;
- il restreint sa liberté d'aller et venir pour les besoins de son activité ainsi que celle de ses clients depuis le 14 mars 2020 ;
- il porte une atteinte manifestement excessive à la liberté d'entreprendre dès lors que, en premier lieu, la décision d'interdiction des activités économiques est disproportionnée au regard de l'objectif de sécurité sanitaire poursuivi, en deuxième lieu, elle a été adoptée sans qu'aucune étude d'impact n'ait mesuré ses conséquences financières et, en dernier lieu, les compensations économiques prévues sont insuffisantes au regard des préjudices subis par le secteur de la restauration ;
- il est discriminatoire dans la jouissance de la liberté d'entreprendre et du droit de propriété en ce qu'il maintient la fermeture de son restaurant jusqu'à nouvel ordre, alors que, d'une part, d'autres secteurs d'activité accueillant du public n'ont fait l'objet d'aucune interdiction ou ont rouvert et, d'autre part, dans son propre secteur d'activité, certains établissements, notamment de restauration...

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