Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 23/01/2012, 340662, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. Edmond Honorat
Record NumberCETATEXT000025210354
Judgement Number340662
Date23 janvier 2012
CourtCouncil of State (France)
Vu le pourvoi, enregistré le 17 juin 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le ministre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09/02816 du 13 avril 2010 par lequel la cour régionale des pensions de Bordeaux a, à la demande de Mme Yamna A, veuve B, d'une part, réformé le jugement n° 05/00128 du 6 juin 2008 par lequel le tribunal départemental des pensions de la Gironde a rejeté sa demande tendant à la réformation de la décision du 23 mai 2005 du ministre de la défense rejetant sa demande de réversion de la pension militaire d'invalidité de son époux décédé le 1er janvier 1999, d'autre part, annulé la décision du 23 mai 2005 du ministre de la défense refusant à Mme A le bénéfice d'une pension de veuve et lui a accordé cette pension à compter de la date de sa demande ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de Mme A ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 61-1 et 62 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

Vu la loi n° 59-1454 du 26 décembre 1959 ;

Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ;

Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 ;

Vu la décision n° 2010-1 QPC du 28 mai 2010 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Chadelat, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ;





Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B, ressortissant marocain ayant servi dans l'armée française du 5 mars 1944 au 1er février 1949, a été admis par arrêté du 15 mars 1959 au bénéfice d'une pension militaire d'invalidité, transformée en indemnité personnelle et viagère en application des dispositions de l'article 71 de la loi du 26 décembre 1959 de finances pour 1960 ; qu'il a épousé en 1982 Mme Yamna A, ressortissante marocaine ; que M. B est décédé le 1er janvier 1999 ; que, par une demande adressée à l'administration le 11 août 2004, Mme A a sollicité le bénéfice d'une pension de réversion du chef de son époux décédé ; que, par une décision du 23 mai 2005, le ministre de la défense a rejeté sa demande au motif que son mariage était postérieur à la date à laquelle est appréciée la situation familiale ouvrant droit à réversion, soit le 1er janvier 1961, date d'entrée en vigueur de l'article 71 de la loi de finances pour 1960 ; que, par un jugement du 6 juin 2008, le tribunal départemental des pensions de la Gironde a confirmé la décision du ministre ; que, par l'arrêt attaqué, la cour régionale des pensions de Bordeaux a infirmé le jugement du tribunal et accordé à Mme A le bénéfice d'une pension de veuve à compter de la date de sa demande ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation ; qu'aux termes du deuxième alinéa de son article 62 : Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ; qu'enfin, aux termes du troisième alinéa du même article : Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 62 de la Constitution qu'une disposition législative déclarée contraire à la Constitution sur le fondement de l'article 61-1 n'est pas annulée rétroactivement mais abrogée pour l'avenir à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision ; que, par sa décision n° 2010-108 QPC en date du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a jugé que si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ;

Considérant que, lorsque le Conseil constitutionnel, après avoir abrogé une disposition déclarée inconstitutionnelle, use du pouvoir que lui confèrent les dispositions précitées, soit de déterminer lui-même les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles...

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