Conseil d'État, 10ème - 9ème SSR, 30/12/2015, 383294, Inédit au recueil Lebon

Date30 décembre 2015
Record NumberCETATEXT000031861250
Judgement Number383294
CounselSCP SPINOSI, SUREAU
CourtCouncil of State (France)
Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 30 juillet 2014, 30 octobre 2014 et 19 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la section française de l'Observatoire international des prisons demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note n° JUSK1340027N du 8 novembre 2013 relative à la prise en charge des détenus particulièrement signalés, prise par la directrice de l'administration pénitentiaire et adressée aux directeurs et directrices interrégionaux des services pénitentiaires ainsi qu'au directeur de l'école nationale de l'administration pénitentiaire ;

2°) d'enjoindre à la directrice de l'administration pénitentiaire de procéder à la diffusion de la décision à intervenir auprès de l'ensemble de ses services ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son article 34 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de procédure pénale ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 ;
- le décret n° 2011-817 du 6 juillet 2011 ;
- le décret n° 2014-558 du 30 mai 2014 ;
- la circulaire interministérielle du 30 octobre 2012 ;
- l'instruction ministérielle du 15 octobre 2012 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jacques Reiller, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la section française de l'Observatoire international des prisons ;




Sur la fin de non-recevoir opposée par la garde des sceaux, ministre de la justice :

1. Considérant que l'interprétation que, par voie, notamment, de circulaires ou d'instructions, l'autorité administrative donne des lois et règlements qu'elle a pour mission de mettre en oeuvre n'est pas susceptible d'être déférée au juge de l'excès de pouvoir lorsque, étant dénuée de tout caractère impératif, elle ne saurait, quel qu'en soit le bien-fondé, faire grief ; qu'en revanche, les dispositions impératives à caractère général d'une circulaire ou d'une instruction doivent être regardées comme faisant grief, tout comme le refus de les abroger ; que le recours formé à leur encontre doit être accueilli si ces dispositions fixent, dans le silence des textes, une règle nouvelle entachée d'incompétence ou si, alors même qu'elles ont été compétemment prises, il est soutenu à bon droit qu'elles sont illégales pour d'autres motifs ; qu'il en va de même s'il est soutenu à bon droit que l'interprétation qu'elles prescrivent d'adopter, soit méconnaît le sens et la portée des dispositions législatives ou réglementaires qu'elle entendait expliciter, soit réitère une règle contraire à une norme juridique supérieure ;

2. Considérant que la note attaquée du 8 novembre 2013, adressée par la directrice de l'administration pénitentiaire aux directeurs interrégionaux des services pénitentiaires et au directeur de l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire, a pour objet de présenter toutes les mesures spécifiques de surveillance des personnes détenues figurant au répertoire des détenus particulièrement signalés ; qu'elle comporte des prescriptions impératives à caractère général sur les modalités de surveillance et sur les informations à collecter et transmettre dans l'exercice de cette surveillance ; que, dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par la garde des sceaux, ministre de la justice, tirée de ce que la note attaquée serait dépourvue de caractère impératif, ne peut qu'être rejetée ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

En ce qui concerne les moyens d'incompétence :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 24 novembre 2009 pénitentiaire : " Le service public pénitentiaire participe à l'exécution des décisions pénales. Il contribue à l'insertion ou à la réinsertion des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire, à la prévention de la récidive et à la sécurité publique dans le respect des intérêts de la société, des droits des victimes et des droits des personnes détenues. Il est organisé de manière à assurer l'individualisation et l'aménagement des peines des personnes condamnées " ; qu'aux termes de l'article 22 de la même loi : " L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L'exercice de ceux-ci ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la récidive et de la protection de l'intérêt des victimes. Ces restrictions tiennent compte de l'âge, de l'état de santé, du handicap et de la personnalité de la personne détenue " ; et qu'enfin, l'article D. 276-1 du code de procédure pénale prévoit qu' " en vue de la mise en oeuvre des mesures de sécurité adaptées, le ministre de la justice décide de l'inscription et de la radiation des détenus au répertoire des détenus particulièrement signalés dans...

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