Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 30/01/2019, 408258, Inédit au recueil Lebon

Date30 janvier 2019
Judgement Number408258
Record NumberCETATEXT000038077304
CounselSCP ODENT, POULET
CourtCouncil of State (France)
Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 408258, par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 février et 16 mai 2017 et 7 janvier 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des avocats à la cour d'appel de Paris demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles de professions réglementées ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


2° Sous le n° 408267, par une requête, enregistrée le 22 février 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des jeunes avocats de Paris demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la même ordonnance.

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3° Sous le n° 408289, par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 février et 22 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Conseil national des barreaux, l'ordre des avocats au barreau d'Albertville, l'ordre des avocats au barreau de Vienne, l'ordre des avocats au barreau de Rouen, l'ordre des avocats au barreau des Hauts-de-Seine, l'ordre des avocats au barreau de Lyon et l'ordre des avocats au barreau de Toulon demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 25 de la même ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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4° Sous le n° 408305, par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 février et 23 mai 2017, la conférence des bâtonniers demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la même ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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5° Sous le n° 415795, par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 novembre 2017, 10 janvier et 13 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordre des avocats à la cour d'appel de Paris demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2017-1370 du 20 septembre 2017 portant sur l'accès partiel à la profession d'avocat en France par les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne ayant acquis leur qualification dans un autre Etat membre ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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6° Sous le n° 415827, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 novembre 2017 et 20 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la conférence des bâtonniers demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


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7° Sous le n° 415901, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 novembre 2017 et 22 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Conseil national des barreaux demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le même décret ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 38 et 61-1 ;
- la directive n° 77/249/CEE du 22 mars 1977 ;
- la directive n° 98/5/CE du 16 février 1998 ;
- la directive n° 2005/36/CE du 7 septembre 2005 ;
- la directive n° 2013/55/UE du 20 novembre 2013 ;
- la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ;
- la loi n° 90-1259 du 31 décembre 1990 ;
- la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016, notamment son article 216 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- l'ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 ;
- le décret n° 2017-1370 du 20 septembre 2017 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Coralie Albumazard, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de l'ordre des avocats à la cour d'appel de Paris, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat du Conseil national des barreaux et autres, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du syndicat des avocats de France et à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la conférence des bâtonniers et autres.




Considérant ce qui suit :

1. L'article 216 de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a autorisé le Gouvernement, dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnances " les mesures relevant du domaine de la loi qui ont pour objet de transposer les directives mentionnées ci-après : / (...) 2° Dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) n° 1024/2012 concernant la coopération administrative par l'intermédiaire du système d'information du marché intérieur (" règlement IMI ") (...) ". L'ordonnance du 22 décembre 2016 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles de professions réglementées, prise sur le fondement de cette habilitation, a notamment pour objet de prévoir un accès partiel aux activités professionnelles de plusieurs professions réglementées, parmi lesquels figurent les avocats. Les modalités de son application ont été définies par le décret du 20 septembre 2017.

2. Par des requêtes qu'il y a lieu de joindre, l'ordre des avocats à la cour d'appel de Paris, l'union des jeunes avocats de Paris, le Conseil national des barreaux et autres et la conférence des bâtonniers demandent l'annulation pour excès de pouvoir de l'ordonnance du 22 décembre 2016 et du décret du 20 septembre 2017 pris pour son application.

3. Les ordres des avocats à divers barreaux et le syndicat des avocats de France justifient d'un intérêt suffisant à l'annulation de l'ordonnance attaquée. Ainsi, leurs interventions au soutien des requêtes du Conseil national des barreaux et autres et de la conférence des bâtonniers sont recevables.

Sur le cadre juridique :

4. D'une part, le paragraphe 1 de l'article 4 septies ajouté à la directive 2005/36/CE du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles par la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 dispose que : " L'autorité compétente de l'État membre d'accueil accorde un accès partiel au cas par cas à une activité professionnelle sur son territoire, uniquement lorsque toutes les conditions suivantes sont remplies : / a) le professionnel est pleinement qualifié pour exercer dans l'État membre d'origine l'activité professionnelle pour laquelle un accès partiel est sollicité dans l'État membre d'accueil ; / b) les différences entre l'activité professionnelle légalement exercée dans l'État membre d'origine et la profession réglementée dans l'État membre d'accueil sont si importantes que l'application de mesures de compensation reviendrait à imposer au demandeur de suivre le programme complet d'enseignement et de formation requis dans l'État membre d'accueil pour avoir pleinement accès à la profession réglementée dans l'État membre d'accueil ; / c) l'activité professionnelle peut objectivement être séparée d'autres activités relevant de la profession réglementée dans l'État membre d'accueil. / Aux fins du point c), l'autorité compétente de l'État membre d'accueil tient compte du fait que l'activité professionnelle peut ou ne peut pas être exercée de manière autonome dans l'État membre d'origine ".

5. D'autre part, aux termes du paragraphe 3 de l'article 1er de la directive 2005/36/CE : " Lorsque, pour une profession réglementée déterminée, d'autres dispositions spécifiques concernant directement la reconnaissance des qualifications professionnelles sont prévues dans un instrument distinct du droit communautaire, les dispositions correspondantes de la présente directive ne s'appliquent pas ".

6. L'article 25 de l'ordonnance attaquée a inséré dans la...

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