Conseil d'État, Assemblée, 19/07/2019, 424216, Publié au recueil Lebon

Date19 juillet 2019
Judgement Number424216
Record NumberCETATEXT000038801233
CounselSCP SPINOSI, SUREAU
CourtCouncil of State (France)
Vu la procédure suivante :

1°) Sous le n° 424216, par une requête sommaire et deux autres mémoires enregistrés le 17 septembre 2018, le 2 janvier 2019 et le 19 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association des Américains accidentels demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les deux décisions implicites par lesquelles le ministre de l'action et des comptes publics a rejeté ses demandes tendant à ce qu'il soit procédé à l'abrogation, d'une part, de l'arrêté du 5 octobre 2015 portant création par la direction générale des finances publiques d'un traitement automatisé d'échange automatique des informations dénommé " EAI " et, d'autre part, de l'arrêté du 25 juillet 2017 modifiant l'arrêté précité ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'action et des comptes publics de procéder à l'abrogation de ces deux arrêtés dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, au besoin sous une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante : " Les articles 5, 45 et 46 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données doivent-il être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale organisant, de manière répétitive et non circonscrite aux seules hypothèses de lutte contre la criminalité, la collecte, le stockage, l'exploitation et le transfert, vers un Etat tiers, des données fiscales des contribuables résidant sur le territoire de l'Etat membre concerné mais possédant la nationalité de cet Etat tiers ' " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


2°) Sous le n° 424217, par une requête et deux autres mémoires enregistrés le 17 septembre 2018, le 2 janvier 2019 et le 19 juin 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association des Américains accidentels demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit procédé à l'abrogation du décret n° 2015-907 du 23 juillet 2015 ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de procéder à l'abrogation de ce décret dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir, au besoin sous une astreinte de 500 euros par jour de retard ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle suivante : " Les articles 5, 45 et 46 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données doivent-il être interprétés en ce sens qu'ils s'opposent à une réglementation nationale organisant, de manière répétitive et non circonscrite aux seules hypothèses de lutte contre la criminalité, la collecte, le stockage, l'exploitation et le transfert, vers un Etat tiers, des données fiscales des contribuables résidant sur le territoire de l'Etat membre concerné mais possédant la nationalité de cet Etat tiers ' " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 ;
- le règlement (UE) n° 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- la directive (UE) n° 2016/680 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 ;
- la convention n° 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel du 28 janvier 1981 ;
- la convention fiscale franco-américaine du 31 août 1994 modifiée ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique du 14 novembre 2013 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures discales ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
- la loi n° 2014-1098 du 29 septembre 2014 ;
- le décret n° 2015-1 du 2 janvier 2015 ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Ramain, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de l'association des Américains accidentels ;



Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces du dossier que, par un accord conclu le 14 novembre 2013, le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique se sont engagés à améliorer le respect des obligations fiscales à l'échelle internationale et à mettre en œuvre la loi relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers (dite " loi FATCA "), notamment en renforçant les échanges d'informations entre leurs administrations fiscales. La loi du 29 septembre 2014 a autorisé l'approbation de cet accord. Afin d'assurer la mise en œuvre de cet accord, le décret du 23 juillet 2015 a défini les modalités de collecte et de transmission des informations par les institutions financières. Par une délibération n° 2015-311 du 17 septembre 2015, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a autorisé le ministre des finances et des comptes publics à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel ayant pour finalité le transfert vers l'administration fiscale américaine des données collectées et stockées en application de cet accord. Par un arrêté du 5 octobre 2015 modifié par un arrêté du 25 juillet 2017, le ministre des finances et des comptes publics a créé un traitement d'échange automatique des informations dénommé " EAI " organisant notamment la collecte et le transfert de données à caractère personnel aux autorités fiscales américaines, en application de l'accord du 14 novembre 2013. L'association des Américains accidentels demande l'annulation pour excès de pouvoir des décisions par lesquelles un refus a été opposé à ses demandes d'abrogation du décret du 23 juillet 2015 et de l'arrêté du ministre de l'action et des comptes publics du 5 octobre 2015, modifié par celui du 25 juillet 2017, portant création du traitement " EAI " en tant qu'il organise la collecte et le transfert de données à caractère personnel aux autorités fiscales américaines.

Sur les interventions de M.A... :

3. M. A...ne justifie pas d'un intérêt le rendant recevable à intervenir à l'appui des requêtes. Ses interventions sont, par suite, irrecevables.

Sur l'office du juge de l'excès de pouvoir dans le contentieux du refus d'abroger un acte réglementaire :

4. En raison de la permanence de l'acte réglementaire, la légalité des règles qu'il fixe, la compétence de son auteur et l'existence d'un détournement de pouvoir doivent pouvoir être mises en cause à tout moment, de telle sorte que puissent toujours être sanctionnées les atteintes illégales que cet acte est susceptible de porter à l'ordre juridique. Cette contestation peut prendre la forme d'un recours pour excès de...

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